Le Pont de Limay
Ce Vieux Pont, véritable cordon ombilical serpentant, tortueux, entre la vieille Mante frileuse, apeurée, affamée, assoiffée, claquemurée et Limay la libre, respirant à pleins poumons l'air qui ne connaît pas l'entrave de remparts, s’enivrant de l'eau pure jaillissant si généreusement des sources de vie, attirant la chaleur bienveillante du soleil sur ses coteaux propices aux cultures qui s'annoncent généreuses... Mante et Limay, si voisines, presque cousines... comme Chiens et Loups...
D'après une gravure ancienne, sans doute de C. Chastillon (1) |
"Qui m'aime, aime mon chien" aurait dit Henri IV mais parlait-il réellement de Mante ? "Mante fut par Henri nommée son chien fidèle" aurait été inscrit, en 1786 sur un arc de triomphe dressé pour recevoir la visite du roi de France Louis XVI, sans doute en souvenir des paroles du roi de France préféré des Français : "Messieurs de Mante, Je n'avais aucune inquiétude pour vous ; bons chiens reviennent toujours à leur maître". Notre "Bon Roi" n'aurait-il donc jamais apprécié les fiers et indépendants Loups de Limay ?
Quelle compagnie de l'arquebuse a-t-elle choisit son nom de canidé en premier ? Celle de Mantes ? Celle de Limay ? Le chien, domestique, si dépendant d'un maître, rentrant chaque soir s'abriter à la niche ; le loup, épris de liberté, si indépendant, s'adaptant à chaque saison... le chien et le loup, si voisins, presque cousins... si différents...
Les archives regorgent des querelles qui ont divisé les deux villes ; Mante avait, comme un besoin vital, le désir d'agrandir son territoire en annexant sa voisine, pourtant sur l'autre rive du fleuve nommé Seine, mais disposant des ressources qui manquaient à la ville entourée de murs mais Limay ne se laissait pas faire.
On retrouve au long des siècles des disputes entre les Chiens de Mante et les Loups de Limay comme en 1568 lorsque les habitants de Limay ont fait appel au roi de France, alors Charles IX, au sujet des hommes de troupe de passage que ceux de Mante envoient loger à Limay, considérant le village comme leur faubourg alors que Limay est bien une paroisse indépendante comme le reconnaîtra le Roi en donnant raison à ses "pauvres sujets les manants et habitants de Limay" en interdisant aux habitants de Mante de se décharger sur la voisine de leurs obligations de logement des soldats. Charles IX n'a pas réussi à réconcilier nos Loups avec les Chiens voisins puisqu'en 1790, par exemple, nous retrouvons un rapport de municipalité racontant en détails une rixe entre les deux municipalités lorsque, le 05 octobre de cette année, des membres de la municipalité de Mante seraient venus réclamer des droits qu'ils prétendent posséder sur l'île accessible par le pont... les insultes ont fusées en direction des membres de la municipalité de Limay et un dénommé Leroy a porté un coup de poing à l'estomac au maire de Limay ; Monsieur Leroy est alors ancien marchand de vaches et le vrai sujet de la dispute était justement le droit de pâturage sur cette fameuse île...
Les Chiens de Mantes et les Loups de Limay ont-ils enfin trouvé un terrain d'entente ?
Les archives regorgent des querelles qui ont divisé les deux villes ; Mante avait, comme un besoin vital, le désir d'agrandir son territoire en annexant sa voisine, pourtant sur l'autre rive du fleuve nommé Seine, mais disposant des ressources qui manquaient à la ville entourée de murs mais Limay ne se laissait pas faire.
On retrouve au long des siècles des disputes entre les Chiens de Mante et les Loups de Limay comme en 1568 lorsque les habitants de Limay ont fait appel au roi de France, alors Charles IX, au sujet des hommes de troupe de passage que ceux de Mante envoient loger à Limay, considérant le village comme leur faubourg alors que Limay est bien une paroisse indépendante comme le reconnaîtra le Roi en donnant raison à ses "pauvres sujets les manants et habitants de Limay" en interdisant aux habitants de Mante de se décharger sur la voisine de leurs obligations de logement des soldats. Charles IX n'a pas réussi à réconcilier nos Loups avec les Chiens voisins puisqu'en 1790, par exemple, nous retrouvons un rapport de municipalité racontant en détails une rixe entre les deux municipalités lorsque, le 05 octobre de cette année, des membres de la municipalité de Mante seraient venus réclamer des droits qu'ils prétendent posséder sur l'île accessible par le pont... les insultes ont fusées en direction des membres de la municipalité de Limay et un dénommé Leroy a porté un coup de poing à l'estomac au maire de Limay ; Monsieur Leroy est alors ancien marchand de vaches et le vrai sujet de la dispute était justement le droit de pâturage sur cette fameuse île...
Les Chiens de Mantes et les Loups de Limay ont-ils enfin trouvé un terrain d'entente ?
Encore aujourd'hui, à l'entrée du pont de Mantes, deux chiens géants, statufiés, tournés vers Limay, défient les loups... tapis... silencieux, attentifs... invisibles depuis bien longtemps sauf sur les pompeuses armoiries de la ville qui résument pourtant une partie du passé de la cité à celui qui veut bien les regarder ; sur ce blason, encadré par deux loups dressés sur leurs pattes arrières et se servant de leurs pattes avant comme de bras, figure en bonne place un pont, en référence évidemment à notre bon Vieux Pont mais ces deux éléments constituant les armoiries de la ville ne sont pas les seuls... Les Loups de Limay vont-ils s'éveiller et sortir du bois ?
Le bon Vieux Pont de Limay, qui ne lui appartient même pas puisqu'il est propriété -justement- de Mantes, mais qui fait si intiment corps avec la ville... depuis toujours... passe pour être l'un des plus anciens ponts de France et doit dater, bien que des documents sur son origine n'existent pas comme tels, du 11e siècle car une charte signée aux environs de 1074, concernant une donation faite à l'abbaye de Cluny par Simon, dernier comte du Vexin et comte de Mante, de ses droits sur l'abbatiale de Notre Dame avec divers biens, fait mention d'un
revenu annuel à prendre sur la moitié du tonlieu (droit sur les marchandises passant un pont) du château de Mante... ce qui est donc une trace tangible de l'existence de notre bon Vieux Pont en cette époque fort reculée... et, puisque nous avons effleuré la rivalité entre Chiens et Loups qui semble avoir toujours existé, soulignons que, dans cette même charte, Girard de Limay se joint à Simon, ce qui veut dire qu'ils avaient des intérêts liés et qu'ils étaient bien obligés, parfois, de s'entendre ; Girard donne le cens qu'il percevait sur huit arpents de vigne dont quatre se trouvent à Mante et le reste à Limay ainsi que quelques terres et cultures...
Obligatoirement, dans les temps les plus reculés, en bois, il est évident que les vestiges du pont que nous aimons tant sont en pierre alors, faisons un grand pas dans l'histoire et transportons-nous au 17è siècle pour tenter d'imaginer notre Vieux Pont.
Sans doute par la volonté de Sully lorsqu'il était grand voyer de France, le pont va se refaire une beauté mais cette réalisation ne verra le jour qu'après l'assassinat d'Henri IV et lorsque Sully sera déjà en mésintelligence avec Marie de Médicis, régente du Royaume pour son fils Louis XIII.
Et donc, vers l'an 1613, 37 arches de pierre relient Mante et Limay partagées, comme à l'origine, en trois parties dont la première est constituée de 13 arches qui surplombe le bras de Seine du côté de Mante, la deuxième partie, également de 13 arches, survole les marécages de l'île de Limay (l'île aux Dames) et la dernière partie qui ne comporte que 11 arches, mais qui garde un petit côté de son passé en conservant des arches plus anciennes et quelques constructions fort utiles à l'activité humaine, enjambe le bras du fleuve du côté de Limay.
Quelles constructions pouvaient-elles se trouver sur ce Vieux Pont, utiles à l'activité humaine de surcroît ?
Note :
(1) Claude Chastillon né vers 1560, décédé en 1616 - Ingénieur, topographe du Roi Henri IV. On lui doit un impressionnant nombre de reproductions de villes et de monuments divers réalisées pour rendre compte de ses visites à travers le royaume. Ces dessins nous offrent donc le reflet du royaume de France à son époque.
Le bon Vieux Pont de Limay, qui ne lui appartient même pas puisqu'il est propriété -justement- de Mantes, mais qui fait si intiment corps avec la ville... depuis toujours... passe pour être l'un des plus anciens ponts de France et doit dater, bien que des documents sur son origine n'existent pas comme tels, du 11e siècle car une charte signée aux environs de 1074, concernant une donation faite à l'abbaye de Cluny par Simon, dernier comte du Vexin et comte de Mante, de ses droits sur l'abbatiale de Notre Dame avec divers biens, fait mention d'un
revenu annuel à prendre sur la moitié du tonlieu (droit sur les marchandises passant un pont) du château de Mante... ce qui est donc une trace tangible de l'existence de notre bon Vieux Pont en cette époque fort reculée... et, puisque nous avons effleuré la rivalité entre Chiens et Loups qui semble avoir toujours existé, soulignons que, dans cette même charte, Girard de Limay se joint à Simon, ce qui veut dire qu'ils avaient des intérêts liés et qu'ils étaient bien obligés, parfois, de s'entendre ; Girard donne le cens qu'il percevait sur huit arpents de vigne dont quatre se trouvent à Mante et le reste à Limay ainsi que quelques terres et cultures...
Obligatoirement, dans les temps les plus reculés, en bois, il est évident que les vestiges du pont que nous aimons tant sont en pierre alors, faisons un grand pas dans l'histoire et transportons-nous au 17è siècle pour tenter d'imaginer notre Vieux Pont.
Sans doute par la volonté de Sully lorsqu'il était grand voyer de France, le pont va se refaire une beauté mais cette réalisation ne verra le jour qu'après l'assassinat d'Henri IV et lorsque Sully sera déjà en mésintelligence avec Marie de Médicis, régente du Royaume pour son fils Louis XIII.
Et donc, vers l'an 1613, 37 arches de pierre relient Mante et Limay partagées, comme à l'origine, en trois parties dont la première est constituée de 13 arches qui surplombe le bras de Seine du côté de Mante, la deuxième partie, également de 13 arches, survole les marécages de l'île de Limay (l'île aux Dames) et la dernière partie qui ne comporte que 11 arches, mais qui garde un petit côté de son passé en conservant des arches plus anciennes et quelques constructions fort utiles à l'activité humaine, enjambe le bras du fleuve du côté de Limay.
Quelles constructions pouvaient-elles se trouver sur ce Vieux Pont, utiles à l'activité humaine de surcroît ?
Note :
(1) Claude Chastillon né vers 1560, décédé en 1616 - Ingénieur, topographe du Roi Henri IV. On lui doit un impressionnant nombre de reproductions de villes et de monuments divers réalisées pour rendre compte de ses visites à travers le royaume. Ces dessins nous offrent donc le reflet du royaume de France à son époque.
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